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Le musée de Mallawi revoit le jour

Nasma Réda, Lundi, 26 septembre 2016

Le musée de Mallawi à Minya rouvre aujourd'hui ses portes au public après avoir été quasi détruit en 2013 suite à une attaque terroriste. Il présente aujourd'hui une exposition exceptionnelle de 944 pièces.

Le musée de Mallawi revoit le jour
(Photo : Nasma Réda)

Trois ans après sa fermeture, le musée de la ville de Mallawi, dans le gouvernorat de Minya en Haute-Egypte, rouvre ses portes aux visiteurs. Avec 944 pièces antiques, dont 503 exposées pour la première fois, le musée retrace l’histoire de la ville. « Ces nouvelles pièces ont été soigneusement choisies des entrepôts des sites archéologiques d’Al- Bahnassa et d’Al-Achmouniya qui se trouvent à Minya », explique Ahmad Al-Leithy, directeur du musée. Ces pièces sont le résultat des travaux de fouilles archéologiques effectués dans le gouvernorat.

Le musée de Mallawi revoit le jour
(Photo : Nasma Réda)

L’espace d’exposition est composé de trois grandes salles. Les deux premières retracent les rites religieux de la région à travers les siècles, tandis que la troisième raconte les activités du gouvernorat, son industrie et son mode de vie, depuis l’époque pharaonique à l’époque islamique, en passant par l’ère romaine et copte. « La muséographie — l’art d’exposer les oeuvres — a aujourd’hui beaucoup évolué. Un musée n’est pas un lieu où les pièces sont disposées les unes à côté des autres. La façon dont on expose des oeuvres peut également porter un message ou servir à faire comprendre le sens de ce qui est exposé. Suivant cette logique, le secteur des musées a réfléchi à une nouvelle manière d’exposition basée surtout sur la pensée religieuse du peuple de Mallawi et de Minya à l’époque pharaonique », a indiqué le ministre des Antiquités, Khaled Al- Anani, au cours de l’inauguration. « Les pièces montrent également la relation qui existait entre l’adorateur et sa religion, et comment celuici a évolué à travers les siècles », explique le directeur du musée. Les panneaux jouxtant les pièces antiques racontent l’histoire de l’art copte et gréco-romain. D’autres mettent en avant les avancées scientifiques de l’ère pharaonique et d’autres encore soulignent le développement de l’industrie textile. Les panneaux explicatifs sont ponctués par des pièces soigneusement sélectionnées qui viennent illustrer leurs propos. « Les grandes pièces comme les sarcophages, les statues et les momies expliquent, elles, les rites égyptiens », explique Elham Salah, présidente du secteur des musées au ministère des Antiquités. Une grande partie du trésor découvert en 2007 à Deir Al-Bercha, à l’ouest de Mallawi, fait partie des pièces mises en avant.

Un musée marqué par son temps

Le musée de Mallawi revoit le jour
(Photo : Nasma Réda)

Le choix d’une méthode d’exposition basée sur le cheminement de la pensée religieuse chez les habitants de Mallawi et de Minya à l’époque des pharaons n’est pas sans lien avec les événements de 2013 qui avaient failli démolir intégralement le musée. Lors de cette année particulièrement dense politiquement, quelques émeutiers avaient protesté à Minya contre la dispersion des sit-in des Frères musulmans au Caire. Des groupes armés avaient ensuite attaqué le musée, et détruit et volé plus de 1 040 pièces. « Ces groupes terroristes n’ont laissé que 46 pièces colossales sur place, mais ils les ont partiellement détruites et brûlées », témoigne le directeur du musée Ahmad Al-Leithy. La police a ensuite réussi à récupérer 656 pièces antiques. « On a vécu des moments difficiles. Ces deux jours d’attaque, de destruction, de vol et de violence ont été très durs », se souvient Amal Mahran, superviseur du musée qui a été témoin de l’attaque du musée en 2013. « Après la destruction des vitrines et le vol des pièces en 2013, les responsables du musée ont tout rénové et opté pour des matériaux plus résistants aux bombardements ». Lors de l’inauguration, Khaled Al- Anani a rendu hommage au martyr Sameh Ahmad Abdel-Latif qui a été tué en défendant le musée. D’après le ministre, « cette réouverture du musée de Mallawi est un message fort adressé au monde entier. Il reflète notre lutte face au terrorisme et à la destruction du patrimoine », affirme Al-Anani.

Le musée de Mallawi revoit le jour
Epitaphe d'un tombeau remontant à l'époque ottomane. (Photo : Nasma Réda)

« La nouvelle muséographie du musée porte un message de tolérance », souligne Elham Salah. Al-Anani a aussi salué les efforts des restaurateurs égyptiens pour sauver la plupart des pièces retrouvées. « Un nouveau système de sécurité a été appliqué », assure Al-Leithy. Les travaux de restauration des pièces ont coûté 10 millions de L.E. fournies par le ministère des Antiquités, le gouvernorat de Minya et le gouvernement italien. Selon la présidente du secteur des musées, les musées aujourd’hui ne sont pas seulement des lieux d’exposition, ils participent également à la sensibilisation des citoyens à l’importance des antiquités, surtout les plus jeunes. « Tous les musées doivent mettre en place un système éducatif qui permet de développer l’intérêt pour la protection du patrimoine », indique Salah. Selon le ministre, l’inauguration du musée de Mallawi est un grand défi contre le terrorisme que le peuple égyptien a réussi à surmonter. « Notre prochaine rencontre se fera au Caire, pour l’inauguration du Musée d’art islamique », conclut-il.

53 ans d'histoire

Vu l’importance historique et la richesse de la ville de Mallawi, le président Gamal Abdel-Nasser a donné l’ordre en 1962 de construire un musée retraçant son histoire. Inauguré le 23 juillet 1963, le musée a été édifié sur une superficie de 1 900 m2, et se divise en deux étages. Le rez-de-chaussée est dédié à l’exposition tandis que le premier étage, lui, regroupe les bureaux des employés. Entre 1963 et 2013, 1 089 pièces y ont été exposées. Ces artefacts racontaient l’histoire et la richesse de la région depuis l’ère pharaonique jusqu’à l’époque islamique, en passant par les époques copte et gréco-romaine...........

Une ville millénaire

Le musée de Mallawi revoit le jour
Une collection de pièces de monnaie (or, argent et bronze) découverte à Tuna Al-Gebel, remontant aux différentes époques. (Photo : Nasma Réda)

Située à plus de 50 km au sud du gouvernorat de Minya en Haute-Egypte, Mallawi, dont le nom signifie « l’entrepôt », abrite une quantité importante d’antiquités. Les régions de Tuna Al- Gebel, d’Al-Achmouniya (Hermopolis Magna) et d’Al-Cheikh Eibada (Antinoupolis) figurent parmi les sites les plus riches du gouvernorat. La région de Tuna Al-Gebel a été édifiée en l’honneur du dieu Thot. Elle abrite le célèbre tombeau de Pétosiris, le prêtre de Thot, qui remonte à la XXXe dynastie. Le site regorge de salles souterraines abritant près de 4 millions de momies. Elle renferme également une nécropole gréco-romaine et des catacombes renfermant d’innombrables momies d’Ibis et de Babouins, animaux sacrés dans l’Egypte antique.

A douze kilomètres à l’est de Tuna Al-Gebel se situe la cité d’Al-Achmouniya, appelée aussi Hermopolis Magna. Elle était la capitale du 15e nôme de la Haute-Egypte (Ancien Empire 2543- 2120 av. J.-C.). A Achmouniya se trouvent les ruines du temple principal dédié au dieu Thot datant du Nouvel Empire (1550-1070 av. J.-C.) et un autre dédié au dieu Amon.

Outre ces antiquités pharaoniques, Mallawi abrite aussi des vestiges du forum et de la basilique de l’ancienne ville romaine ainsi que le tracé des voies principales fondées par l’empereur romain Hadrien (117-138) au IIe siècle lors de son voyage en Egypte. La cité aujourd’hui est peu visitée, car il ne reste que quelques statues de babouins, l’animal symbolisant Thot devant le temple démoli et un musée en plein air regroupant quelques vestiges remontant à plusieurs époques retrouvées sur le site. En face d’Hermopolis Magna se trouve Antinoupolis, ou Antinoé, qui est une cité antique. Elle fut créée par l’empereur Hadrien. Cette cité romaine abrite la mémoire du jeune favori de l’empereur Antinoüs (IIe siècle), mort noyé dans le Nil.

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