Al-Ahram Hebdo,Nulle part ailleurs | Une photo, plusieurs cadres

  Président
Abdel-Moneim Saïd
 
Rédacteur en chef exécutif
Hicham Mourad
  Conseiller de la rédaction
  Mohamed Salmawy

Nos Archives

 Semaine du 25 au 31 août 2010, numéro 833

 

Contactez-nous Version imprimable

  Une

  Evénement

  Enquête

  Dossier

  Nulle part ailleurs

  Invité

  Egypte

  Economie

  Monde Arabe

  Afrique

  Monde

  Opinion

  Kiosque

  Société

  Arts

  Livres

  Littérature

  Visages

  Environnement

  Voyages

  Sports

  Vie mondaine

  Echangez, écrivez



  AGENDA


Publicité
Abonnement
 
Nulle part ailleurs

Initiative. Prendre en photo des enfants défavorisés pour les rendre heureux ou vendre des portraits de gens aisés et profiter de l’argent pour créer de nouvelles infrastructures, tel est le but de jeunes photographes membres de l’association Help Portrait.

Une photo, plusieurs cadres

« Est-ce que je peux te prendre en photo ? », demande la jeune Salwa à un enfant du village d’Al-Gabal, situé aux alentours d’Alexandrie. Et sans attendre sa réponse, elle appuie sur le déclic et continue de se balader en compagnie de son collègue Mahmoud dans les ruelles du village pour en prendre d’autres, surtout des enfants. Ces deux photographes font partie de l’association Help Portrait Alexandrie, qui regroupe des jeunes de différentes formations et maîtrisant l’art de la photographie. Ces derniers ont décidé de profiter de leur talent pour rendre les gens heureux à travers une photo. « Notre visite au village d’Al-Gabal fait partie d’une série d’autres que l’on programme régulièrement dans les endroits les plus défavorisés. Notre objectif : photographier les gens et les rendre heureux à travers une photo », explique Salwa, étudiante à la faculté des beaux-arts. Elle poursuit en affirmant qu’avoir un portrait de soi est une chose banale et beaucoup d’entre nous en possèdent des dizaines, mais pour des gens qui peinent à gagner leur pain, c’est le grand luxe. Alors l’association, à travers ses membres, utilise les moyens qu’elle possède pour rendre le sourire à des gens démunis en les prenant en photo puis en leur offrant ce portrait, eux qui n’ont jamais eu l’occasion d’en avoir. « Et même si nous étions convaincus par l’idée dès le départ, après s’être lancés dans ce projet, on a vu des sourires se dessiner sur les visages des gens en regardant leurs portraits, et de là, on a été persuadés de la noblesse de notre geste », dit Mahmoud Gaballah, étudiant à la faculté des beaux-arts et membre de l’association.

Une idée mondiale

En fait, Help Portrait est une idée qui s’est répandue dans le monde et qui a été lancée au mois de décembre 2009. Cette initiative vise à rendre les gens les moins chanceux plus heureux à travers leurs portraits que l’on développe et donne gratuitement.

L’association regroupe des photographes de tous les pays du monde et qui ont décidé d’utiliser leur expérience dans ce domaine de la photographie pour servir les gens défavorisés dans leurs sociétés. Le but étant de montrer que l’art de la photographie est capable de révéler les côtés positifs et négatifs d’une société et peut contribuer à son changement.

Selon Ahmad Farès, fondateur de Help Portrait Alexandrie, les photographes prennent du temps parfois afin de trouver quelqu’un pour le prendre en photo. Donc, faire profiter ces gens en prenant d’eux une photo pourrait les rendre heureux surtout s’ils n’ont pas à la payer. « C’est notre façon de les remercier en leur offrant une photo », dit Farès.

Vaincre le doute

Fondée en Egypte en même temps qu’ailleurs, cette association a commencé par les habitants des quartiers Al-Max et Kom Al-Dekka car ce sont surtout ces endroits qui ont toujours inspiré les photographes. « Nous avons pris là-bas plus de 400 photos et nous avons surpris les gens en les suspendant sur des cordes à linge dans les rues pour que chacun puisse prendre la sienne. Je ne peux pas vous décrire la joie qu’ils ont ressentie », poursuit Farès. Dans les villages ou les endroits choisis par les jeunes pour prendre des photos, c’est toujours la joie qui règne. Les enfants les plus audacieux se mettent devant l’objectif, d’autres plus timides se cachent derrière leurs parents, tandis que certains ont besoin d’être convaincus pour accepter d’être pris en photo. Quant aux adultes, ils sont parfois effrayés par la présence d’étrangers qui viennent spécialement pour prendre des photos de leurs enfants, alors ils les cachent et commencent à poser des dizaines de questions aux jeunes photographes. « Qui nous dit que vous n’allez pas prendre des photos de nos enfants sales et démunis pour les montrer sur les chaînes satellites ? Vous êtes en train de nous duper », ainsi pensent beaucoup de villageois, mais ils ne vont pas tarder à changer d’avis, surtout en voyant ces mêmes photographes revenir avec les photos développées pour les distribuer aux enfants. Chacun tient la sienne, la regarde et a du mal à croire que quelqu’un s’est intéressé à lui et lui a offert son portrait. Selon Farès, les enfants sont le but essentiel de ce projet. Ils méritent qu’on leur donne de la joie et un peu de confiance en eux-mêmes. Cette photo peut avoir un sens plus large car c’est un moyen de construire un avenir. Il n’est pas rare de voir des sacs remplis de vêtements pour le déguisement afin que les enfants les enfilent avant de prendre une photo. « Qu’est-ce que tu souhaiterais faire plus tard ? Menuiser, médecin, peintre ou infirmière, l’enfant se déguise à sa guise et la photo est prise avec la tenue qui convient au métier qu’il a choisi. On lui donne l’occasion de rêver et on lui remet sa photo qui porte son prénom précédé du titre comme, par exemple, le plombier Ali ou l’ingénieure Dina ; ainsi on leur fait savoir que ce rêve est réalisable », affirme-t-il.

Il ajoute qu’il tient à remettre les photos aux enfants le jour même. Et il se souvient du jour où il en a pris quelques-unes d’enfants atteints du cancer et lorsqu’il est retourné le lendemain pour les remettre, il y en avait un qui était mort durant la nuit et donc il n’a pas pu voir sa photo. Hôpitaux, orphelinats et endroits démunis sont les cibles des jeunes photographes cherchant à prendre des visages d’enfants en photo. « Pour tranquilliser les gens qui peuvent avoir des doutes sur nos intentions, on fait ce travail en collaboration avec des ONG, des Rotary clubs et des étudiants de différentes facultés, surtout celles de médecine », dit Farès, lui-même médecin.

Au cours des derniers mois, l’association a pris plus de 2 400 photos qui ont dessiné le sourire sur les visages des gens qui vivent dans la misère. D’après Salwa, le geste de prendre en photo un enfant n’est pas simple du tout. Il faut d’abord casser les barrières en leur parlant gentiment et en leur faisant sentir qu’ils peuvent avoir confiance en nous. Salwa ne peut pas oublier le cas d’une jeune fille qui refusait qu’on la prenne en photo. Après l’avoir convaincue et en voyant sa photo, elle s’est mise à pleurer. « Je ne m’attendais pas à une aussi belle photo, j’avais peur de paraître laide sans mes cheveux », a dit la fille qui suit des séances de chimiothérapie. Cette dernière s’est sentie comme une star en ayant sa photo entre les mains. Salwa affirme que le moment le plus émouvant est celui où les enfants reçoivent leurs photos. La joie et l’allégresse se lisent sur tous les visages, surtout en nous suppliant de ne pas quitter et de revenir une autre fois.

L’autre point important sur lequel travaillent les membres de l’association, qui a deux antennes à Alexandrie et au Caire, c’est de créer l’infrastructure nécessaire dans certains endroits. « On prend en photo des gens aisés et avec cet argent on choisit des endroits privés d’eau potable, d’électricité, ou de drainage sanitaire pour installer ce qui manque », explique Ahmad Haymane, photographe et responsable de Help Portrait Le Caire. C’est très fréquent de voir ces jeunes dans les hypermarchés, centres de shopping ou librairies avec un stand en train d’expliquer ce qu’ils font, entourés d’individus qui veulent se faire photographier. Des gens qui sont prêts à payer entre 10 et 100 L.E. pour aider les plus pauvres. « On organise aussi des cours d’initiation en photographie et l’argent que l’on ramasse sert également à financer ces cours », confie Haymane. En fait, ce travail n’a pas tardé à porter ses fruits puisqu’en quelques mois, l’âge de l’association en Egypte, l’équipe du Caire a fait plus de 1 500 photos dont l’argent va servir à faire rentrer l’eau potable dans la région d’Al-Ayate. Quant à l’équipe d’Alexandrie, elle a fait plus de 1 600 photos, dont l’argent a servi à construire 50 maisons dans la région d’Al-Hawis. Selon Farès, Help Portrait résume l’amour que l’on porte à la photographie. En initiant les gens à cet art et en l’utilisant comme moyen de remercier ces gens qui sont en fait les héros de ces photos, on est parvenu à dessiner ce sourire sur leurs visages.

Hanaa El-Mekkawi

 




Equipe du journal électronique:
Equipe éditoriale: Névine Kamel- Howaïda Salah -Thérèse Joseph- Héba Nasrédine
Assistant technique: Karim Farouk
Webmaster: Samah Ziad

Droits de reproduction et de diffusion réservés. © AL-AHRAM Hebdo
Usage strictement personnel.
L'utilisateur du site reconnaît avoir pris connaissance de la Licence

de droits d'usage, en accepter et en respecter les dispositions.