Télévision Egyptienne. Salwa Hégazi, une des principales figures de la télévision égyptienne à
sa naissance, s’est douloureusement éteinte laissant des
traces inoubliables sur le petit écran.
La
martyre
On
ne peut parler de Salwa Hégazi sans ressentir de l’émotion,
voire sans verser une larme. Cette speakerine de la première
génération de la télévision est une figure inoubliable, de
par son talent et de par sa douceur. Née le 1er janvier
1933, au Caire, elle présenta des programmes qui restent des
classiques de ce début. Avec Leïla Rostom et Amani Nached,
elle fut une figure de proue, surtout qu’elle a réussi à
présenter des émissions d’art et de culture qui s’accordent
avec sa nature et sa culture et d’autres qui sont plus «
news » et reportages comme le veut la télé en tant que média
populaire. On garde toujours dans l’esprit « Reportage », «
L’art et la vie » et « La soirée des amis ». Avec son visage
et son expression sereine, voire angélique, elle partait à
la conquête des téléspectateurs, tous âges confondus. En
plus, elle avait un sens de l’engagement qui différait quand
même de celui très officiel qui marquait l’époque
nassérienne. Un engagement humain et de sentiment surtout.
On cite notamment ce programme pour enfants Les oiseaux du
paradis présenté tous les mercredis qu’elle rédigeait et
présentait. Un effet si profond et si agréable qu’on
l’appelait « Maman », la première à porter ce titre,
l’équivalent de celui du légendaire présentateur de radio «
Baba Charo ». Tous les enfants des années 1960 étaient
éblouis et conquis par cette maman. En fait, c’est son âme
de poète qui a apporté cette originalité à sa carrière de
speakerine. Salwa Hégazi écrivait des poèmes en français.
Ancienne élève du Lycée français du Caire, elle est l’auteur
de deux recueils de poèmes en français et d’un conte
d’enfant, et ses poésies lui ont valu la médaille d’or de
l’Académie française de poésie en 1964. « Ombre et Clarté »
et « Jours sans fin » sont les titres de ses recueils. Or,
cette femme, toute faite de clarté, a connu un terrible
sort, une mort tragique. Le 21 février 1973, alors qu’elle
était à bord d’un avion de la Libyan Airways rentrant au
Caire en provenance de Tripoli, l’appareil a été abattu par
des avions Phantom israéliens, parce qu’il avait, par erreur,
franchi la ligne du Canal de Suez vers le Sinaï alors occupé
par Israël. Un incident qui a eu d’importantes répercussions
politiques. Elle fut décorée à titre posthume par le
président Sadate et considérée comme une martyre. Une fin
qui rappelle son poème Mourir mais pas souffrir, tiré du
recueil « Jours sans fin » :
« J’ai peur de la douleur
J’ai peur, je ne puis
souffrir
Je voudrais comme ce soleil
Me coucher ainsi sans bruit
Je voudrais que la mort
m’emporte
comme une barque que la mer
engloutit ...
Passer et quitter sans
bruit », a-t-elle dit aussi.
On ne t’oubliera jamais
Salwa ... .
Ahmed
Loutfi