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La vie mondaine
Théâtre . Dans Maman, je veux gagner des millions Ahmad Al-Attar continue de croire aux miracles impossibles. Embarqué dans cette quête d'une vie meilleure, il se retrouve bafoué, cogné de mille et une réalités.

Le miroir de la médiocrité

Après avoir attendu en vain le retour de son oncle d'Amérique qui avait promis monts et merveilles, Ahmad Al-Attar crie : « Maman, je veux gagner des millions ». Entêté de manière obsessionnelle, il va participer à l'émission télévisée Qui est le héros ?

S'il est élu premier, il réalisera son rêve d'argent et de pouvoir. Mais même son conte de fées intitulé Le Vaillant Hassan et la pomme d'or, où le héros devrait accomplir les plus difficiles exploits pour mériter sa belle, raconte que notre intrépide jeune homme se retrouve désarmé au bout du chemin qu'il a choisi : la route du non-retour où l'échec vous suit jusqu'au bout.

Dans sa pièce précédente, Attar nous offre à voir les membres de sa famille chacun enfermé dans sa chambre, telle une cellule. Aujourd'hui, il voit plus grand. C'est toute la société compartimentée sur la scène. Des fragments de la vie quotidienne qui prouvent et reprouvent qu'il n'y a aucune échappatoire. L'émission donne courage ? Mais il n'y a que des tarés qui y participent. Plus fumiste encore, l'animateur du programme. Ce n'est pas non plus parmi les habitués du café qui fument le narguilé et jouent au trictrac qu'un quelconque héros peut percer.

L'école, ultime lieu de savoir et de connaissance, féconde des illettrés. Le prof élevé au rang de prophète par l'une de nos maximes les plus respectueuses de la transmission du savoir (une autre maxime dit : je suis l'esclave de celui qui m'a enseigné une lettre) est un pauvre instituteur qui ne réclame aux écoliers que le par cœur des leçons. Toute analyse ou même compréhension est bannie du système scolaire. D'ailleurs, l'instituteur finit par battre l'élève quand il hésite à un moment de sa récitation. Et nous sommes dans une école laïque !

Le soldat est certes le personnage le plus symbolique dans la société. C'est lui qui protège notre terre et la défend contre l'ennemi agresseur. C'est lui qui verse son sang sur le champ de bataille pour que reste élevé l'étendard de l'honneur et de la fierté de son peuple. Ce soldat, chez Al-Attar, ne déserte pas, ne dépose pas ses armes, ne cherche pas le repos du guerrier, il jure fidélité et soumission au drapeau américain. C'est le moment le plus fort de la pièce. Car ce qu'on aurait pu croire être une fantaisie dramatique touche la réalité de trop près.

Puis il reste Hassan, celui de la rue et non pas du conte. Il est déprimé, chômeur et fatigué. Il mange ses pâtes embrouillées d'une sauce tomate à la couleur incertaine et nous regarde. Silence. Mais dans la scène finale, il se prépare en boxeur pour devenir héros. Il le sera, car il a mis le doigt sur l'énigme : détester les Egyptiens pour devenir citoyen américain. De quelle catégorie, la pièce ne le dit pas.

Tout ceci est rythmé par l'apparition d'une femme qui traverse la scène. A chaque fois, elle « les » maudit. Ceux-ci ont été responsables de tous ces dégâts. Les dégâts humains qui résultent de la profusion intégrale de la médiocrité sont vite récupérés par ces émissions factices, substituts encore plus médiocre que les discours de lavage de cerveau, mais qui font miroiter au loin ce rêve tangible annoncé par l'émission.

Cet échantillon du paramètre de bêtise quotidienne dans tous les secteurs aurait pu être plus poignant si l'écriture des scènes n'avait pas été aussi inégale. L'éclairage jouant sur l'obscurité a été un choix peu heureux qui n'éclairait pas assez les idées et les situations qui, elles, étaient très éclatantes. L'éclairage ne correspond certainement pas à nos références visuelles lumineuses. Froid et embué, il a contribué à une distanciation imprévue.

Mais le plaisir de voir des acteurs comme Sayed Ragab et Hassan Kretly nous fait oublier ces quelques défaillances.

Menha el Batraoui

Du 9 au 11 février et du 13 au 19 février, à 20h

Mother, I Want to be a Millionaire, mise en scène d'Ahmad Al-Attar, au théâtre Al-Falaki de l'Université américaine.

Pour réserver Tél. : 010 144 56 88

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