Chronologie

— Née le 26 janvier 1942, Soad Hosni fait partie d'une famille de 17 frères et sœurs, dont la plupart sont des demi-frères.
— La petite Soad a commencé sa carrière artistique à l'âge de 3 ans, en participant au programme pour enfants Papa Charo à la radio. Quant au cinéma, elle y a débuté à l'âge de 15 ans par le film Hassan et Naïma réalisé par Barakat en 1958.
— Elle a interprété 83 films de cinéma, dont un seul a été tourné dans les années 1950. Elle a vécu son plus grand succès cinématographique au cours des années 1960 en jouant dans 54 films. Seuls 15 autres ont été tournés durant les années 1970. Cette baisse en nombre de films n'allait pas de pair avec son talent artistique qui au contraire n'a pas cessé de gagner en profondeur et richesse. Il en a résulté qu'elle n'a joué que dans 13 films seulement pendant les années 1980. Elle a terminé sa carrière cinématographique par Al-Raï wal nissaa (Le Berger et les femmes) en 1991.
— En 1996, elle a été choisie, lors d'un référendum organisé par le Festival international du cinéma du Caire, comme la star n°2, après Faten Hamama, ayant interprété 9 des meilleurs films de l'histoire du cinéma égyptien, entre autres Al-Qahira 30 (Le Caire des années 30), Al-Karnak (Le Karnak), Ghouroub wa chourouq (Coucher et lever du soleil), Ahl al-qémma (Les gens du sommet) et Al-Zawga al-saniya (La Seconde épouse).
— Malgré sa célébrité en tant que star, Soad Hosni a participé à 3 feuilletons de radio, à savoir Nadia en 1968, Al-Hob al-daïe (L'Amour perdu) en 1969 et Ayamon maahou (Des jours avec lui), tiré d'un roman de Colette Khoury, et interprété pour la radio parisienne.
— Elle n'a présenté qu'un seul feuilleton à la télévision égyptienne, Howa wa hiya (Lui et elle), avec Ahmad Zaki et le réalisateur Yéhia Al-Alami.
— Elle a présenté trois chansons qui sont à l'origine de la chanson vidéoclip arabe. La première était Dola min ? (Qui sont ceux-ci ?) écrite par Ahmad Fouad Negm. Puis, Ma yoëkhaz bil qouwa (Ce qui est pris par la force). Enfin Sabah al-kheir ya mawlati (Bonjour ma reine), dont les paroles sont de Salah Jahine et la musique de Sayed Mékkawi et Kamal Al-Tawil.
— Elle a interprété 4 films de production étrangère. Le premier, intitulé Al-Nass wal Nil (Les Gens et le Nil), était une coproduction égypto-soviétique, alors que le deuxième, Nar al-hob (Le Feu de l'amour), était d'une production libanaise en 1986. Le troisième film était iraqien. Il a été projeté en 1981 sous le titre d'Al-Qadessiya. Quant au quatrième, il était d'une production marocaine. Ce dernier a vu le jour en 1988 sous le titre d'Afghanistan ... Limaza ? (Afghanistan ... Pourquoi ?).
— Soad Hosni a reçu de nombreux prix et hommages. Le premier prix reçu, celui de la meilleure actrice pour son rôle dans Al-Zawga al-saniya, lui a été offert par le ministère de la Culture en 1968. Ce prix de meilleure actrice lui a été décerné 4 autres fois, dont la dernière était en 1981.
— Elle a reçu le prix de la Société du film 5 fois consécutives depuis 1975 jusqu'à 1984. Elle a également été honorée par l'ancien président Anouar Al-Sadate en 1979 à l'occasion de la Fête de l'art. Elle a, de même, reçu le prix du ministère de l'Information en 1987 pour son rôle dans le feuilleton Howa wa hiya, à l'occasion de l'anniversaire de la télévision égyptienne.
— Soad Hosni s'est mariée trois fois. D'abord, avec le réalisateur Salah Karim en 1966, union qui a duré deux ans seulement. Ensuite, avec le réalisateur Ali Badrakhan en 1970 pendant onze ans. Enfin, avec l'écrivain Maher Awwad en 1984.

Cinéma . Après une longue lutte contre la maladie et le désespoir, Soad Hosni, la « Cendrillon » du cinéma égyptien et arabe, s'est éteinte jeudi dernier à Londres, où elle vivait depuis plus de 12 ans pour y recevoir un traitement médical. Différente, elle l'a été tout le long de sa carrière artistique, sa mort aussi se situe dans un registre dramatique quasi exceptionnel.
La mort de Cendrillon

La Cendrillon du cinéma égyptien rejoint ainsi d'autres artistes authentiques qu'un mal de vivre a poussé vers la mort tels que Marilyn Monroe et Dalida. Une enquête est menée sur la cause de sa mort et la thèse du suicide n'est pas exclue.
Mais quelle que soit sa fin ou la cause de sa mort, elle restera toujours un astre rayonnant et une star exceptionnelle dans l'histoire de l'art arabe et du cinéma égyptien.
Etrange destinée qui fait que l'actrice, qui a été synonyme de joie de vivre et d'amour, passe ses dernières années dans la dépression totale. Pourtant, le public n'a rien pu faire d'autre que l'aimer, qu'aimer ses films, son sourire, ses divers rôles et sa voix pleine de douceur et de charme. Elle, à son tour, n'a pu éprouver, d'après son entourage et ses amis et malgré sa grave maladie et ses maux sérieux, que de l'amour envers tout le monde.
Si le cinéma égyptien a connu le star-system dès les années 1930, surtout avec Mohamad Abdel-Wahab, puis Aziza Amir, Fatma Rouchdi, Nagat Ali, Mary Queeny, Assia, puis Faten Hamama, Mariam Fakhreddine, Hind Rostom, Leïla Mourad et Chadia, la belle Soad Hosni a réussi, par sa nature tout à fait différente et grâce à un travail très sérieux, à se tailler une place à part dans ce gotha. Les années 1960 témoignent de son irrésistible ascension. Elle régnera par la suite, presque sans partage, jusqu'au moment où elle abandonnera sa carrière (Lire chronologie).
C'est sans doute la diversité de son registre qui lui donne les moyens d'exceller tant dans les rôles dramatiques que comiques ou dans les comédies musicales, et qui lui permet de s'imposer. En plus, c'est cette mystérieuse présence, l'aura distinctive des stars qui explique comment elle a pu conquérir le public. Avec le temps et l'expérience, elle a par la suite considéré que l'artiste avait une mission spéciale à accomplir. « Je sens en moi l'importance de contribuer à l'élévation du niveau de l'art et du film égyptien », a dit Soad Hosni dans un entretien publié en 1975. Elle ajoute : « Je me sens responsable de remédier aux maux des gens. Je vois en cela un devoir humain et national. J'appartiens à ce peuple et je ressens ce qu'il ressent ». Cela explique pourquoi elle tente de précéder le souhait des gens simples et pourquoi elle a préféré parfois jouer des comédies musicales où danses et chansons y abondent, « c'est en vue de donner joie et gaieté aux spectateurs ».
Elle aime également être l'héroïne d'une belle histoire d'amour romantique qui fait que les spectateurs y vivent aussi leurs aventures sentimentales, s'identifiant à elle. Ces choix relèvent d'une spontanéité et d'un sens inné de l'art qui n'ont pas empêché Soad Hosni de devenir une professionnelle, celle qui excelle dans tous les genres.
Au départ, la Cendrillon a voulu être chanteuse et non pas actrice, ce qu'elle faisait dans les émissions enfantines de la radio. Mais l'écrivain Abdel-Rahmane Al-Khamissi lui a donné la chance de sa vie en la proposant pour le film Hassan et Naïma, ce Roméo et Juliette aux accents campagnards.
Mais comment expliquer cette ascension qui a fait qu'elle a devancé, du moins s'est démarquée de toutes les autres stars adulées par le public ? Ce sont des traits caractéristiques que les autres n'avaient que partiellement. « Elle avait plus de souplesse, de mouvement et d'enthousiasme que Faten Hamama, plus d'attraction et de naturel que Leïla Mourad et enfin plus de spontanéité et de fraîcheur devant la caméra que Madiha Yousri, Loubna Abdel-Aziz, Samira Ahmad et Nadia Loutfi. Par ailleurs, elle a excellé dans le choix et l'exécution des tableaux et des danses dans ses films de telle sorte qu'elle a eu le dessus sur la fameuse Naïma Akef », estime Mahmoud Qassem, écrivain et critique.


Politique et comédie musicale

Cet aspect tout fait de vivacité ou de romantisme qui a marqué les débuts de sa carrière s'est enrichi par la suite de films politiques marquant de plus en plus une prise de conscience. Et si elle a commencé dans ce domaine en 1966 avec Al-Qahira 30 (Le Caire des années 1930), adapté d'un roman de Naguib Mahfouz, elle a pu renforcer cette présence pendant les années 1970 par une série de films, à savoir : Ghouroub wa chourouq (Coucher et lever du soleil, 1970), Al-Ekhtiyar (Le Choix, 1971), Al-Karnak et Ala men notleq al-rassas (Sur qui tirons-nous le feu ?, 1975). Ces films vont d'une critique des abus de la période d'avant la Révolution à l'univers tortionnaire de l'époque nassérienne. Ainsi, Soad Hosni a été la seule star de sa génération à jouer un si grand nombre de films politiques, tout en maintenant son genre de prédilection, la comédie musicale.
Avec tout cela, il y a cette expression si simple et si irrésistible de cette star. Soad Hosni a remplacé par sa beauté simple et orientale la beauté légendaire provenant d'Hollywood, et qui a dominé pendant de longues années. L'innocence radieuse de son visage et sa petite taille avec de belles courbes ont permis aux 37 réalisateurs qui ont travaillé avec elle de tirer le maximum : grâce à sa forte présence et à sa disposition. Cette simplicité a fait de Soad Hosni une idole irremplaçable dans l'histoire de l'art égyptien. D'ailleurs, elle fut l'une des rares de sa génération à refuser de porter des perruques blondes pour imiter les stars occidentales, fière d'être une jolie brunette.
Elle paraît selon l'objectif de la caméra, selon le directeur de la photographie, Mohsen Nasr, « d'un naturel extraordinaire ». « Elle était d'une attraction incomparable, même en présence des stars de sa génération qui étaient de grands noms du cinéma ».
Le compositeur Kamal Al-Tawil remarque : « Soad Hosni possède une voix qui touche le cœur directement, sans introduction ! Sa voix est la meilleure pour présenter les chansons des films, parce que chaude et forte en même temps ».
Un journaliste a un jour posé une question à Cendrillon sur la plus belle chose qu'elle trouvait en elle-même. Elle répondit : « Ce sont des choses que je vois dans le regard des gens ». Ces choses sont autant le secret de son rayonnement que la cause de sa tristesse et de son angoisse les dernières années de sa vie. Outre les maux physiques dont elle souffrait tout le long des 17 dernières années, lors de son voyage médical à Londres, elle était victime de dépression. C'est la disparition de ce regard admiratif du public qui était sa raison d'être.
Certes, il y a eu les maladies et la gêne financière. Elle refusait pourtant d'être aidée par les riches arabes. Elle souffrait également des rumeurs, qui la pourchassaient jusqu'à Londres. Le pire, pour elle, était ce visage devenu déformé par l'hémiplégie. Ce fut ensuite le fait qu'elle ait pris beaucoup de poids. Elle n'était plus la Cendrillon adulée du public, du moins se voyait-elle ainsi. Cette douce femme et cette actrice fidèle à son métier a toujours été liée à son public. Elle se voyait en lui. Sa crise de santé a d'ailleurs coïncidé avec celle du cinéma égyptien au milieu des années 1980.
Les derniers jours ont été les plus durs. Elle était convaincue qu'elle ne retrouverait plus sa grâce et qu'elle n'oserait plus affronter son public. La veille de sa mort, elle prit connaissance du rapport de ses médecins : son cas était incurable, disent ses amis à Londres. Soad Hosni n'a trouvé d'autre issue à sa souffrance et à son amour pour la vie que la mort. Une fin dramatique qui contraste avec les heureux dénouements de ses films pleins de gaieté et d'espoir. Pourtant, et malgré cette fin dramatique, Soad Hosni a été et restera toujours une brise légère par un jour de canicule.

Yasser Moheb

Retour au sommaire

La Une   L'événement   Le dossier   L'enquête   Nulle part ailleurs   L'invité   L'Egypte   Affaires   Finances   Le monde en bref   Points de vue   Commentaire   Carrefour   Portrait   Littérature   Livres   Arts   Société   Sport   Escapades   Loisirs   Echangez, écrivez   La vie mondaine  
Al-Ahram Hebdo
[email protected]